france_musique,@, - La fin de Cinéma Song (France Musique) : la seule émission de la FM nationale consacrée à la musique de film s'arrête. La fin de Cinéma Song (France Musique) : la seule émission de la FM nationale consacrée à la musique de film s'arrête.

france_musique,@, - La fin de Cinéma Song (France Musique) : la seule émission de la FM nationale consacrée à la musique de film s'arrête.

- Publié le 21-08-2015




L'émission Cinéma Song, diffusée depuis 4 ans sur France Musique et produite par Thierry Jousse, ne fait pas sa rentrée en septembre. Il s'agissait de l'unique rendez-vous radiophonique hebdomadaire consacré aux musiques de films sur une antenne FM nationale. 

L'émission Cinéma Song était diffusée chaque jeudi de 22h30 à minuit sur France Musique depuis septembre 2011. Votre serviteur (Benoit Basirico de Cinezik) y avait d'ailleurs une chronique mensuelle. Son producteur Thierry Jousse officiait déja auparavant sur l'antenne, de 2008 à 2011, en duo avec Laurent Valero, pour animer l'émission Easy Tempo. Avec la suspension de Cinéma Song, il retrouve son camarade d'Easy Tempo à la rentrée (avec un préambule en solo et au quotidien ce mois d'Août). Sa voix continuera de se faire entendre, avec peut-être quelques instants BO au sein de sa programmation.

La dernière de Cinéma Song était consacrée le 2 juillet 2015 à William Friedkin, et c'est en ces termes que Thierry Jousse a conclu l'émission : "Cinema Song disparaît mais renaitra d'une autre façon". 

La musique de film a du mal à se faire accepter à la radio en tant que sujet en soi digne de mériter une émission entièrement dédiée. Pourtant, le public est présent à des (ciné)-concerts de plus en plus fréquents, les compositeurs français rayonnent à l'international (Alexandre Desplat ou Ludovic Bource et leur Oscar)... La musique de film est peut-être considérée comme placée entre deux chaises (deux arts). D'une part elle est incapable de trouver sa place dans une logique musicale (la musique de film est impure, hétéroclite, n'est pas un genre en soi et convoque tous les styles, elle ne peut ainsi pas se positionner dans l'esprit des programmateurs entre une émission de jazz et une émission de variété française). D'autre part, elle ne trouve pas sa place dans une logique cinématographique : par exemple, dans l'émission cinéma de France Inter ("On aura tout vu", le samedi matin), dés qu'il s'agit de programmer de la musique en intermède aux critiques de film et aux interviews, il ne s'agit jamais de musique de film (originale), mais de la playlist de France Inter (variété française, rock...) ou d'une chanson preéxistante au film cité. La radio s'inscrit là dans une logique qui est celle des médias en général et des journalistes de cinéma en particulier, pour lesquels le cinéma est une question de regard, où l'oeil prend le pas sur l'oreille. Il suffit d'écouter le Masque et la plume ou La dispute - émissions de critiques - pour s'en rendre compte, ainsi que de constater la disparition totale des rubriques BO des magazines Première et Studio-Cinélive. Mentionnons le choix surprenant du magazine SoFilm de consacrer entièrement son numéro d'été (actuellement en kiosque) au rapport entre musique et cinéma. Même si cette initiative est à saluer, il est regrettable que le sujet "musique de film" soit considéré à la marge du cinéma, comme l'objet d'un "spécial été", et non disséminé toute l'année dans les numéros "cinéma". Pour en revenir à la radio, quelle ironie que le média de l'oreille ne puisse prendre en charge cet aspect ! Pourtant, Thierry Jousse (comme avant lui Nicolas Saada, producteur de l'émission culte "Nova fait son cinéma"  qui depuis que son responsable est devenu cinéaste n'a pas été maintenue à l'antenne) était journaliste cinéma (et même rédacteur en chef des Cahiers du cinéma), et auteur d'un documentaire sur le sujet musical (avec Nicolas Saada, tiens donc). Ainsi, il peut y avoir isolément des hommes de cinéma amateurs de musique de film (et des femmes - mentionnons Sophie Loubière qui eut une chronique sur France Info - elle aussi disparue). Le problème vient surement des logiques de programmation évoquées. 

Enfin, nous n'évoquons ici que les stations du service public (dont la mission publique serait de considérer la diversité, la pluralité, en n'excluant par de leur réseau d'antenne un métier entier : celui de compositeur pour l'image), car les antennes plus commerciales (comme RTL, qui a pourtant en son sein l'animateur Vincent Perrot, grand amoureux de la musique de film, réalisateur d'un documentaire sur Ennio Morricone, mais qui n'a pas pu imposer à sa direction l'idée d'une émission exclusivement dédiée au sujet) ont une logique mercantile qui justifie la crainte de consacrer une émission entière et régulière (on parle bien d'un créneau en soi dans la programmation) à de la musique instrumentale. Parfois, il leur arrive de prétendre diffuser de la musique de film, mais il s'agit bien souvent de chansons preéxistantes. On peut parvenir à entendre de la musique de film sur Radio Classique (grande concurrente de France Musique), mais exclusivement dans le genre classique (un Bernard Herrmann succède à Beethoven et Mozart), et rarement dans des émissions dédiées avec interview des protagonistes.  Ainsi, le côté trans-genre de la musique de film pose problème. Un véritable magazine hebdomadaire dédié au travail (et au rêve) des musiques de films, évoquant les films à l'affiche chaque semaine du point de vue de leurs musiques, reste à inventer.

Cette suspension peut nous faire réfléchir plus largement à une question : la musique de film, conçue par la commande d'un producteur ou réalisateur, au service d'un film, d'un récit, de personnages, d'une image, peut-elle prendre son autonomie pour se faire entendre sans images à la radio, au dépend des catégories de styles ? A Cinezik, nous pensons que si. 

 


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