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Benoit Basirico - Publié le 18-05-2016

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Avec leur nouveau film, les frères Dardenne reconduisent chaque élément qui a fait leur succès depuis ROSETTA (leur première palme d’or), l’absence de musique en fait partie. Celle-ci jusque-là justifiée, se révèle désormais comme un principe qui amène le film à son échec. 

Rappelons qu’avant leur Palme d’or, ils collaboraient avec des compositeurs, sur LA PROMESSE (1996) avec Jean-Marie Billy et Denis M'Punga, sur JE PENSE À VOUS (1992) avec Wim Mertens, FALSCH (1987 - leur première fiction après plusieurs documentaires) avec Jean-Marie Billy et Jan Franssen. Ce qui paraît comme une évidence quand on pense aux Dardenne ne l’est finalement pas depuis toujours. On a ainsi l’impression que depuis ROSETTA (1999), les frères cinéastes reproduisent un schéma et une méthode qui jusque là fonctionnaient, portaient ses fruits… mais qui désormais s’épuise et sature.

Cette absence de musique érigée en principe devient une prison pour les cinéastes qui au lieu de se questionner à chaque film sur le besoin ou pas de musique, d’écouter ce qu’appelle le film, sont étriqués dans leur propre cinéma qui leur échappe et dont ils peinent à sortir. Il leur faudrait peut-être un échec retentissant, aussi bien au palmarès cannois, dans la presse et auprès du public, pour être libéré de ce carcan et parvenir à prendre des risques en se renouvelant, ce que Bruno Dumont (« Ma Loute » également en compétition) est parvenu à faire, pas seulement en convoquant comme les belges pour la première fois dans son cinéma des acteurs de renom mais en glissant vers la comédie burlesque. 

Peut-être ce nouveau film va sonner ce salut. Alors qu’ils tentent ici un glissement vers quelque chose de plus cérébral et fantasmatique (film sur la culpabilité, avec Adèle Haenel - malgré tout formidable), pour la première fois, le sentiment de la nécessité d’une musique est apparue, pour éviter le sentiment de désincarnation des émotions et incarner un invisible, instaurer du mystère. La fille est inconnue, mais le film est trop balisé pour surprendre, étonner, émouvoir, inquiéter… Par la musique, les frères Dardenne auraient pu trouver ce souffle et cette profondeur dont le manque se ressent pour la première fois.

Benoit Basirico

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