bercot-ent20090710,tirez_sur_caviste, - Interview Emmanuelle Bercot (Tirez sur le caviste, France 2) Interview Emmanuelle Bercot (Tirez sur le caviste, France 2)

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Interview réalisée à Paris le 3 juillet 2009 par Benoit Basirico - Publié le 03-07-2009




Emmanuelle Bercot évoque sa collaboration avec le chanteur Christophe pour le téléfilm TIREZ SUR LE CAVISTE diffusé dimanche 12 juillet sur France 2. Elle revient également sur son parcours en révélant une certaine sensibilité musicale liée à l'intuition et à la danse.

Cinezik : Pourquoi avoir accepté d'adapter le livre de Chantal Pelletier, "Tirez sur le caviste", dans le cadre d'une série de polars sur France 2 ?

Emmanuelle Bercot : Tout d'abord, ça me faisait rire de faire un film avec du sang et des coups de feu. On n'a pas cette occasion tous les jours, et c'est très loin de ce que je fais d'habitude. Cela me donnait l'opportunité de faire un film de genre, quelque chose de plus ludique que d'ordinaire. Et je me retrouvais dans certains aspects des personnages, avec leur côté un peu excessif.

Ce qui faisait la force de cette histoire est qu'elle était racontée du point de l'homme puis du point de vue de la fille, et au niveau de la mise en scène il était amusant de traiter la même scène de points de vue différents.

Nous entendons Wagner dans la première séquence du film, cela vient du livre ?

Le type était en effet fan de Wagner, il l'écoutait dans sa cuisine, c'était un principe de départ, écrit dans le scénario, et ce morceau qui ouvre le film fut une base ensuite au montage. On a voulu chercher des ouvertures d'opéra emphatiques pour le personnage incarné par Niels Arestrup. Ainsi, dans la première partie qui est racontée de son point de vue, il n'y a que de la musique classique, ce qui n'était pas prévu au départ. 

En revanche, la partie féminine du film est composée par le chanteur Christophe, pourquoi ce choix ?

En lisant le livre, il y a ce côté obsessionnel, et puisque Christophe a aussi ce côté fétichiste, je me suis dit que c'était la bonne personne pour entrer dans cet univers. Et je ne me suis pas trompée car il a été très sensible à l'atmosphère du film. 

Christophe, quand il regarde un film, il parle beaucoup de lumière, d'images, beaucoup plus que de l'histoire. D'ailleurs, il n'a lu ni le scénario, ni le livre. Je lui ai proposé, cela ne l'intéressait pas du tout. C'est quelqu'un d'extrêmement intuitif, et c'était bien qu'on travaille ensemble car moi non plus je ne sais pas prévoir, je n'ai ni principe ni théorie, c'est purement intuitif, et il est difficile de travailler avec quelqu'un qui n'est pas comme cela car on n'a pas les mots pour communiquer. Avec Christophe, il n'a jamais été question de mots. Je n'ai pas les mots pour parler de musique, c'est comme parler de lumière à un chef opérateur. C'est abstrait. Je suis donc allé chez lui, il jouait au piano, et je lui disais quand ça me plaisait en espérant qu'il s'en souvienne pour la suite. Puis il a composé la plupart des thèmes à partir de ce bout de piano. 

Vous avez une certaine sensibilité musicale qui vous vient sûrement de la danse que vous avez apprise ?

Je viens en effet de la danse, et quand je dirige les comédiens, ce qui m'obsède c'est la manière dont il bouge, j'ai tendance à les toucher comme on le ferait avec un danseur, pour les mettre dans une certaine position. La musique peut intervenir à l'écriture du scénario pour influer sur une scène, et j'aime bien mettre de la musique sur le plateau lorsque je répète car il y a une magie qui s'opère, un art qui déteint sur l'autre. Je fais aussi entendre la musique aux comédiens, pour les préparer. Sur TIREZ SUR LE CAVISTE, j'ai fait écouter de la musique à Julie Marie Parmentier, des choses qui n'ont rien à voir avec les musiques du film, des cantates de Bach, des musiques sacrées, juste pour donner un état, une émotion. 

Vous venez de la FEMIS, et il semble que la sensibilité musicale y soit rare... êtes-vous l'exception ?

Les élèves de la FEMIS considèrent la musique impure sur une scène car pour eux elle doit être forte en tant que telle. Alors que moi, je pense que la musique fait partie de la mise en scène, elle a le droit de rendre une scène meilleure et d'apporter de l'émotion. Je suis certaine qu'il y a des scènes sauvées par la musique, j'en suis persuadée. 

J'adore la musique dans les films. On m'a déjà dit que j'en mettais trop dans mes films ou que je l'utilisais mal, ce que je peux comprendre car c'est une chose dure à maîtriser. Je me rappelle dans LA PUCE, on m'avait incité à retirer des musiques, ce que je n'ai jamais fait. Tant que la musique me procure une émotion, je n'ai pas à l'enlever.

Pensez-vous par exemple que la FEMIS doive assurer des cours sur ce domaine ?

Ah oui, car j'ai de grosses lacunes. Après, c'est à nous de regarder des films, de repérer les musique de films et de voir comment elle est utilisée dans les films que j'aime. Mais cela me parait énorme. C'est pour cela que pour l'instant je suis obligée de fonctionner à l'intuition. 

Je travaille avec un monteur qui lui est calé sur le sujet, il a une grande sensibilité musicale et a tendance à placer des morceaux existants. C'est comme cela que je trouve intuitivement ce qui pourrait coller au film et que je vais chercher des équivalents, car évidemment on a rarement les droits. 

Finalement, avec Christophe, c'est la première fois que je travaille avec de la musique originale. Car sur BACKSTAGE, c'était un album de variété, et pour le score on a prit des dérivés des thèmes des chansons, donc ce fut un cas particulier. Avec Christophe, c'est la première fois que j'ai du insuffler à un compositeur une musique originale pour mon film. 

Et pour la suite ?

Comme on rêve de trouver son chef opérateur fidèle, je rêverais de trouver un compositeur avec lequel à chaque film il se produira quelque chose, mais je ne l'ai pas encore rencontré. Je viens d'ailleurs de finir de tourner mon prochain film qui sera l'histoire de cette étudiante, Estelle, qui se prostitue pour payer ses études. Ce sera avec Déborah François dans le rôle titre.

Interview réalisée à Paris le 3 juillet 2009 par Benoit Basirico

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