Propos recueillis par Benoit Basirico
- Publié le 20-05-2019Votre musique appartient au style de la musique électronique...
Fatima Al Qadiri : Je suis associée au monde de la musique électronique, mais mon travail est de casser ces etiquettes, ces boites dans lesquelles on peut s'enfermer. Mais ma méthodologie est bien l'électronique.
Avant le cinéma, votre travail était-il déjà lié à l'image ?
F.Q : J'ai fait parti d'un collectif d'artistes conceptuels qui travaillent avec différents sujets liés au monde arabe. Les images m'ont toujours intéressées. Ma mère est peintre. Les images ont toujours influencé mon travail. J'ai toujours su que j'allais arrivé un jour dans le monde du cinéma.
Comment s'est produite la rencontre avec Mati Diop ?
F.Q : ATLANTIQUE est à la fois le premier film de Mati Diop, mais aussi une première pour moi. Mati était une fan de ma musique, elle m'a contactée à travers ma page Facebook. Le fait qu'elle soutienne beaucoup mon style m'a aidé à travailler avec elle. Elle voulait que je sois moi-même. Elle ne voulait pas que je sorte de mon propre univers.
Quel a été votre premier contact avec le film ?
F.Q : C'était la rencontre avec la réalisatrice, notre conversation. Elle m'a envoyé le script et j'ai eu deux ans pour travailler dessus.
Ce film est à la fois une fable politique (avec la réalité des migrants, ceux qui partent de Dakar), et une histoire de fantômes avec un climat fantastique, qu'est-ce qui vous a intéressé en premier ?
F.Q : C'est le côté maléfique, l'esprit des djinns, que j'avais déjà exploré dans ma musique, donc c'était connecté avec mon univers. Les autres aspects culturels de Dakar sont très liés à mon propre pays d'origine, le Koweit, on n'était donc pas loin de ma propre expérience culturelle.
ATLANTIQUE est aussi une romance, une histoire d'amour, est-ce que vous avez essayé de convoquer cet aspect dans votre musique ?
F.Q : Je pense que ma musique est très émotionnelle, il y a du désir toujours présent.
Quelle a été la plus grande contrainte du cinéma pour vous ?
F.Q : Je n'ai pas l'habitude de travailler pour des segments courts, j'ai plutôt l'habitude de pièces plus longues. Mais Mati a une vision très passionnée et elle m'a dirigée là où elle voulait placer la musiques, les sentiments...
Elle était directive ?
F.Q : Elle m'a donné des directions, et aussi une liberté, il faut les deux. Je suis très inspirée par quelqu'un qui sait ce qu'il veut.
Dans votre musique, il y a l'aspect sonore, textural (inhérent à l'électronique), mais il y a aussi de la mélodie...
F.Q : Le plus important dans ma musique, c'est la mélodie. C'est mon obsession. La répétition de lignes mélodiques dans ma musique donnent le sentiment d'une méditation. Mais la réalisatrice voulait du minimalisme, avec très peu d'informations musicales, pour ne pas submerger les personnages.
Avez-vous tenu compte de la géographie du film, tourné dans une banlieue populaire de Dakar ?
F.Q : J'ai suivi l'atmosphère de chaque scène, je voulais travailler de façon homogène avec l'image. Je trouve que la réalité géopolitique est universelle, c'est ainsi que je suis rentrée sur le projet.
Est-ce que la réalisatrice vous a fait écouter des références ?
F.Q : Oui, il y a eu des musiques de références dans un premier montage afin de guider les ambiances de chaque scène.
Quelles sont vos influences en musique de film ?
F.Q : Celui que je préfère est Nino Rota, car Fellini était mon réalisateur préféré. Au cinéma on a plus de thèmes issus de l'écriture orchestrale. Pour ATLANTIQUE, ma musique plus actuelle fonctionnait avec la fragilité des personnages. Un orchestre aurait été en contradiction.
Est-il envisageable de jouer cette B.O lors de vos concerts ?
F.Q : Non, lorsque je me produits, c'est toujours avec mon album le plus récent.
Propos recueillis par Benoit Basirico
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