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cannes-musique,Cannes 2022, - Cannes 2022 : Florilège de propos tirés de nos 14 Interviews faites sur le Festival Cannes 2022 : Florilège de propos tirés de nos 14 Interviews faites sur le Festival

cannes-musique,Cannes 2022, - Cannes 2022 : Florilège de propos tirés de nos 14 Interviews faites sur le Festival

Tous les propos sont recueillis par Benoit Basirico - Publié le 13-06-2022




Voici une sélection de propos tirés des 14 interviews (toutes à écouter en podcast) de compositeurs & compositrices, parfois en compagnie des réalisateurs & réalisatrice, à propos de la musique des films des différentes selections. 

"Don Juan" de Serge Bozon (présenté à Cannes Première, au cinéma le 23 mai 2022)

Serge Bozon : L'idée était de déterminer un style musical, et je pensais qu'il ne fallait pas que ce soit de la pop.

Benjamin Esdraffo (compositeur) : Pour ma musique j'ai écarté tout le côté pop. Serge avait effectivement deux grosses références qui étaient Bruckner et Mahler. Il y avait quatre-vingts musiciens, c'est quand même assez imposant. Il fallait malgré tout éviter le côté "grandes pompes" (...) On a peut-être travaillé encore plus que d'habitude sur ce film, sur la question de la couleur notamment. On a eu l'idée de faire jouer le grand orchestre de manière un peu tamisée, parfois avec des sourdines.

Serge Bozon : Benjamin Esdraffo a fait des arrangements de sorte à ce que les chansons se fondent avec le reste de sa musique pour le film. Il y a déjà une atmosphère musicale qui a été mise, plutôt lyrique, sombre, romantique, germanique, c'est pour cette raison qu'on accepte le caractère un peu lyrique et ombrageux des chansons, elles ont déjà été préparées par le reste.

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"La Nuit du 12" de Dominik Moll (présenté à Cannes Première, au cinéma le 13 juillet 2022)

Olivier Marguerit (compositeur) : Dominik Moll était une force tranquille.  je lui ai proposé de composer beaucoup de musiques en amont, de lui donner pour le tournage, qu’il puisse y réfléchir au début du montage avec le monteur, qu’il puisse travailler à partir de cette base que je lui aurais donnée. Dans un second temps, je le rejoins pour le montage pour adapter la musique. Ainsi pendant assez longtemps ils ont travaillé sans moi. C'était une super méthode en fait, parce qu’en amont du tournage, on a pu échanger beaucoup avec Dominik. J'ai pu savoir ce qui marchait et ce qui ne marchait pas dans le langage musical que je lui proposais, et ensuite je l’ai laissé faire son film. Ainsi le film s'est construit avec mes premières musiques. Ce n'était pas du tout des musiques faites à l'image. Il m'a fait confiance.

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"As Bestas" de Rodrigo Sorogoyen  (présenté à Cannes Première, au cinéma le 20 juillet 2022)

Olivier Arson (compositeur) : On est assez proche, donc je suis toujours un peu au courant des projets qu’il est en train d’écrire, ce qui me permet de lire les scénarios en avance. Et on a toujours des idées très claires avant de commencer chaque film. Et on aime bien les défis tous les deux. On aime bien ne pas trop se reposer sur nos lauriers. On essaie de pousser la machine un peu plus loin à chaque fois. Et puis Rodrigo est très clair dans ses indications, très précis sur ce qu'il veut. Il est très exigeant, mais après il laisse aussi une liberté énorme. Il est vraiment très bon pour trouver l'équilibre entre sa vision et un espace créatif pour ses collaborateurs. Il pousse vraiment à se surpasser, à trouver des solutions que tu n'avais pas pensé. Ce que j'apprécie le plus chez lui c’est qu’il te challenge en permanence, il permet d'aller dans des directions où tu ne te sentais pas capable d’aller.

 

"Les Cinq Diables" de Léa Mysius  (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, au cinéma le 31 août 2022)

Léa Mysius : On parle de la musique dès le scénario. Florencia commence à y réfléchir. L'idée est de parvenir à trouver le film en même temps que la musique, dès l'écriture. 

Florencia Di Concilio (compositrice) : Au-delà des discussions en amont, je finis toujours par composer à l'image.  Mais ma musique est comme une matière, elle peut ensuite être placée ailleurs. Et la monteuse Marie Loustalot travaille très bien avec la musique. C'est une chance. 

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"Alma Viva" de Cristèle Alves Meira (présenté à la Semaine de la Critique)


Cristèle Alves Meira : J'étais attachée à l'aspect globe-trotter d’Amine, qui travaille avec des instruments du monde entier. Il a une richesse culturelle et musicale de par son parcours, son histoire, qu'il a mis au service du film. 

Amine Bouhafa (compositeur) : J'ai samplé une cornemuse pour pouvoir créer toutes les maquettes. Intégrer la vraie cornemuse du nord du Portugal, là où le film a été tourné, faisait partie du travail d’écriture. 

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"Dalva" de Emmanuelle Nicot (présenté à la Semaine de la Critique)

Emmanuelle Nicot : J'ai envie de pleurer en allant au cinéma, j'avais donc envie de faire un film émouvant. J'ai compris en voyant mon film tout nu, puis avec des petits morceaux placés, que mon émotion n'était pas du tout la même, que ça me transportait beaucoup plus avec de la musique. La musique amène une perception du temps qui passe.

Frédéric Alvarez (compositeur) : J'ai jamais autant travaillé avec quelqu'un proche de moi. Elle venait dans mon studio. C'était un travail d'orfèvrerie. Chaque note était placée à tel endroit. Tout était décidé ensemble sur le film, à tel point que je pense que Emmanuelle est presque compositrice sur ce film.

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"Un Varon" / "A Male" de Fabián Hernández (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs)

Fabien & Mike Kourtzer (compositeurs) :  Ce qui nous a intéressés, c'est le cadre de la violence, pas la violence elle-même. Elle est déjà racontée dans le film, donc il était plus intéressant de s'imprégner des murs. La musique, décousue, devait être un élément du décor, pas trop narrative mais comme un élément de l'univers (...) Quand l’image dit tout, si tu racontes exactement la même chose que ce que tu vois, ça ne sert à rien.


"La Jauria" de Andrés Ramirez Pulido (présenté à la Semaine de la Critique, au cinéma le 5 avril 2023 )

Andrés Ramírez Pulido : Dans un premier temps, j'étais très réservé à l'idée d'utiliser de la musique dans mes films. C'est venu petit à petit. J'ai laissé un peu de côté ma propre peur par rapport à la musique. La première rencontre avec Pierre a été décisive. 

Pierre Desprats (compositeur) : Au premier montage que j'ai vu, j'avais la même sensation de réserve sur la musique. Le film était déjà très fort. Les ambiances sonores de la jungle colombienne sont très riches. La première sensation que j'ai eu, c'était que la musique ne pouvait pas être extérieure aux plans, on devait toujours rester dans une sensation de jungle. Finalement, Andrès me disait que la musique devait être subtile mais forte, qu’elle se différencie des ambiances. Dans le film, les musiques s'entendent. 

Andrés Ramírez Pulido : Si on en a voulu, c'était pour que la musique ouvre des perspectives par rapport à l'image. Elle aide à élargir l'horizon. On se posait toujours la question de ce que ressent le personnage. La musique devait servir de miroir émotionnel.

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"Pamfir", film ukrainien de Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs)

Laetitia Pansanel-Garric (compositrice) : “La collaboration a eu lieu à distance. La guerre a été déclarée quand on était en post prod. On a terminé le film en se faisant des commentaires audio sur WhatsApp, il était dans des situations très compliquées, caché dans le métro avec sa compagne. Le travail de la musique paraît très futile dans le contexte, de demander des retours, mais il a tenu et il n'a jamais transigé sur ses choix. J'étais très touchée, embarquée dans leur engagement par rapport à leur culture. Ils sont intègres. Il s'agissait de respecter ça (...) J'ai enregistré beaucoup de pistes de percussions pour obtenir un son extrêmement authentique. Le terme “authentique” venait à chaque phrase dans la bouche de Dmytro.”

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"La Montagne" de Thomas Salvador (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs)


Thomas Salvador : Je connaissais un petit peu ce que faisait Chloé, je sentais qu'elle ne chercherait pas à faire de la musique de film, mais une musique qui lui ressemble. Je sentais qu'il fallait que la musique ait une singularité et qu'elle ne cherche pas à se fondre dans le film, ni dans le paysage (...) Ce qu'on se disait beaucoup, c'était de ne pas raconter ce qu'on voit. Il fallait que la musique, comme le personnage, trouve sa place dans le décor (...) On était sur des textures avant de sentir qu'il fallait aussi de la mélodie, que la musique devait aussi nous raconter une histoire. 

Chloé Thévenin (compositrice) : J’aimais comment il parlait de son film. Plus on discutait, plus je me rendais compte qu’il y avait une grande part de ressenti dans ce qu'il exprimait, de façon ultra organique. Thomas a passé pas mal de temps dans mon studio, ce qui est assez rare, je crois que ce n'est jamais arrivé d'avoir un réalisateur qui passe autant de temps avec moi. Et si j'ai accepté de lui laisser cette place, c'est que tout s'est fait de façon très naturelle. En tant que compositrice, j'ai besoin de chercher des sons, de trouver la matière, d'autant plus en étant issue de la musique électronique, je ne veux pas juste jouer au piano, je suis obligée de travailler les matières. Et dans cet échange avec Thomas de nouvelles choses sont apparues, comme des clés. 



"Le Barrage" de Ali Cherri (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs)


Rob (compositeur) : “J'ai eu beaucoup de plaisir et de facilité à comprendre Ali Cherri, en raison sûrement de son parcours. Il est plasticien et sculpteur (...) C’est aussi mon parcours puisque j'étais aux beaux-arts. Je me destinais moi-même à une carrière de peintre. J'ai toujours fait dans ma musique ce lien entre une démarche picturale et une démarche musicale. J'ai senti qu'avec Ali on avait ce langage commun (...) Il me disait qu’il ne fallait jamais sentir que la musique arrive ou disparaît. Il a beaucoup épuré, il m'a demandé d'enlever plein d'éléments, il choisissait juste une petite parcelle de ce que j'avais fait qu’il mettait en boucle. Comme la glaise utilisée par le personnage, la musique était cette matière très vivante qui a été modelée au fur et à mesure (...)  Entouré de toutes mes machines et instruments préférés, je me laisse complètement aller à une forme de divagation musicale. Je ne sais pas du tout ce que je vais faire au moment où je commence. C'est ma démarche. Il y a certains artistes plus conceptuels qui doivent écrire parfaitement l'intention avant de faire quoi que ce soit. Moi c'est plutôt le contraire. D'abord je me lance, et ensuite je comprends ce que j'ai fait.”



"Sous les figues" de Erige Sehiri (présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, au cinéma le 8 mars 2023)


Erige Sehiri : On s'attend peut être au début, quand on fait un premier film, à ce que ce soit le compositeur qui trouve, mais en vrai, ce qui est beau, c'est qu'on trouve ensemble. On est dans une forme de recherche qui est aussi totalement le travail du réalisateur. J’ai compris en tout cas que la musique ajoute une couleur au film, qu’elle n'est pas, au final, telle je l’avais imaginée au début. C'est le fruit d’un long processus (...) Au départ je voulais que la musique soit très peu présente, deux ou trois interventions.

Amine Bouhafa (compositeur) : On s'est rendu compte que pour que la musique soit le moins perceptible il fallait qu'elle soit plus présente. Avec trois interventions, à chaque fois qu'elle serait là on allait vraiment s'en rendre compte. Il fallait écrire une sorte de flux musical tout en retenue. La musique apparaît dans les moments où il n'y a pas de dialogues pour chapitrer, pour donner un rythme narratif, pour structurer les jalons du film. 



"Tout le monde aime Jeanne" de Céline Devaux  (présenté à la Semaine de la Critique, au cinéma le 7 septembre 2022)


Céline Devaux : Les échanges que j'ai eu avec Flavien Berger sont intervenus bien avant l'écriture (...) On a un tel niveau de confiance qu’il écrit le film avec moi. Je ne lui demande pas de composer sur un montage terminé. Il est là pour ajouter des idées, créer du rythme (...) J’essaie de ne jamais l’influencer. Je le laisse travailler. Je lui indique juste le sens d’une scène, et il va non seulement très bien la comprendre, mais parfois bien mieux la comprendre que moi. 

Flavien Berger (compositeur) : Tu as un vrai appétit pour des idées musicales. Il y a beaucoup de choses qui existent dans le film qui viennent de fantasmes communs que t'a permis de réaliser. Par exemple, faire chanter une chorale d'enfants. Beaucoup d'idées musicales viennent de Céline. En tant que musicien, je n'aurais pas réalisé cette musique sans cette collaboration.



"Plan 75" de Chie Hayakawa (présenté à Un Certain Regard, au cinéma le 28 septembre 2022)


Rémi Boubal (compositeur) : Le dialogue s’est fait à trois entre la réalisatrice, la monteuse Anne Klotz, et moi. C'était très intéressant de partager nos idées. C'est mon rôle de suggérer des moments, mais le rôle du monteur est aussi important, il apporte souvent un autre éclairage. L'idée était en tout cas de mettre de la musique dans les moments clés de l'histoire.





Tous les propos sont recueillis par Benoit Basirico

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