En 1978, Ryuichi Sakamoto co-fonde, avec Haruomi Hosono et Yukihiro Takahashi, le groupe électro-pop Yellow Magic Orchestra (YMO), qui connaît un immense succès au Japon. Après la séparation de YMO en 1983, il se consacre à des projets solo et compose plusieurs bandes originales de films. Il accède à la renommée internationale en 1983 avec les musiques de "Furyo" de Nagisa Ōshima et "Le Dernier Empereur" de Bernardo Bertolucci (1987), Oscar de la meilleure musique de film, dans lesquels il apparaît également en tant qu'acteur. Il travaille avec d'autres grands réalisateurs comme l'Espagnol Pedro Almodovar ("Talons aiguilles", 1991) et l'Américain Brian De Palma ("Snake Eyes", 1998, "Femme fatale", 2002), et collabore à nouveau avec l'Italien Bertolucci, notamment sur "Un thé au Sahara" (1990).
Diagnostiqué d'un cancer de la gorge de stade III en 2014, le compositeur a dû interrompre brièvement sa carrière pour suivre un traitement, mais il est revenu à la composition dès que son état de santé le lui a permis. Son combat pour maintenir sa créativité durant cette période difficile a été capturé dans le documentaire "Ryuichi Sakamoto: Coda", réalisé par Stephen Nomura Schible. Malgré sa santé fragile en 2015, Sakamoto a accepté de créer la bande originale du film "The Revenant" réalisé par Alejandro González Iñárritu. Sa musique sobre et en harmonie avec la nature pour cette histoire épique de survie a été largement saluée. Cette réussite lui a ouvert la voie à une activité intense ces dernières années, avec des œuvres telles que "Proxima" d'Alice Winocour (2019), "Minamata" d'Andrew Levitas (2020) et la série animée "EXCEPTION" (diffusée sur Netflix). Sa dernière contribution annoncée (combinée à des titres préexistants de son répertoire) est pour le célèbre réalisateur japonais Hirokazu Kore-eda ("Les bonnes étoiles", Palme d'Or 2022) dans "Monster" (2023), qui pourrait être en lice lors du prochain Festival de Cannes.
Au cours de sa carrière prolifique, Ryuichi Sakamoto a exploré une multitude de styles musicaux, du rock progressif à la bossa nova, en passant par l'ambient, le rap, la house et la musique contemporaine. Il a su fusionner la musique traditionnelle japonaise avec des éléments occidentaux. Sakamoto a collaboré avec des artistes avant-gardistes ainsi que des célébrités telles qu'Iggy Pop, Cesaria Evora, Caetano Veloso et Youssou N'Dour, ou encore David Sylvian, leader du groupe britannique Japan. Il a sorti plus de 20 albums solo, exploré le monde du ballet et de l'opéra, et a également composé une musique pour la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Barcelone en 1992.
Ses compositions musicales illustrent un savant mélange culturel, combinant des sonorités japonaises et occidentales, ainsi que des éléments électroniques et acoustiques. Elles se caractérisent par une attention particulière accordée à un thème central, lequel est associé à un style d'écriture répétitif et hypnotique, permettant ainsi de plonger profondément dans l'âme des personnages.
En plus de sa carrière musicale, Sakamoto était engagé en faveur de la protection de l'environnement. Suite à la catastrophe de Fukushima en 2011, il est devenu un porte-étendard du mouvement antinucléaire au Japon. Dans cette optique, il a organisé en 2012 un concert contre le nucléaire près de Tokyo, en invitant, avec un brin d'ironie, ses amis de Kraftwerk (qui signifie « centrale électrique » en allemand) et dont l'une des chansons emblématiques est "Radioactivity". Il a également créé l'ONG More Trees pour promouvoir la gestion durable des forêts.
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