par Julien Mazaudier
- Publié le 07-05-2008Michael Nyman a commencé à travailler dans l'édition Musicale en découvrant les archives de Purcell en 1967 à la Purcell Society Edition. La musique composée pour ce film marie certaines de ses recherches avec des bribes de compositions conçues en 1982 ; un processus assez semblable à In Re Don Giovanni. A ce sujet, le compositeur dresse des analogies musicales intéressantes entre les formes de musiques répétitives anciennes des XVIe et XVIIe siècles comme la fugue, les canons ou les rondeaux et les structures modernes du jazz liées au mouvement répétitif américain des années 60. On retrouve en effet des caractéristiques similaires entre ses deux tendances, pourtant distantes de trois siècles comme la basse obstinée ou la chaconne. Le compositeur s'inspire principalement de morceaux assez obscurs de la Musique Baroque comme les interludes de The Fairy Queen de Purcell ou l'intermède de Philipp van Wichel utilisé dans La Représentation du Corps et de l'Esprit d'Emilio de' Cavalieri.
"Les basses obstinées sont les mieux adaptées aux structures harmoniques susceptibles d'être répétées à l'infini, variables, recyclables et empilables sur lesquelles je travaille habituellement. [...] Peter et moi nous avons opté pour une musique qui relèverait à la fois de l'art de Purcell et de celui de Nyman, sans trahir l'un ou l'autre. Si Nyman devait s'imposer, il ne s'éloignerait jamais trop de Purcell : 1892 épouserait 1695." Extrait du livret du cd Meurtre dans un Jardin Anglais.
Ce parallélisme musical entre formes anciennes et modernes se retrouve également dans la démarche de Philip Glass lorsqu'il compose The Photographer. Une pièce qui date de la même époque. Les deux compositeurs ont par ailleurs donnés plusieurs concerts à la "Kitchen", une salle de concert à New-York dédiée à la musique expérimentale. On peut entendre certaines de leurs pièces sur le disque From the kitchen Archives.
Le compositeur devait composer à la base une musique pour les 12 dessins que le dessinateur exécute. Là aussi, la musique n'est pas utilisé pour son caractère émotionnel maiscomme un moyen d'identification. Pour des raisons de durées et de rythme, elle fut raccourcie au montage final. L'écoute du cd qui propose l'intégralité des morceaux donne un bon exemple de la place que la musique aurait dû occuper à l'origine.
L'un des thèmes les plus connus, Chasing sheep is best left to shepherds que l'on entend régulièrement dans le film est constitué principalement d'une section de cuivres et de cordes. La mélodie jouée par la clarinette, la trompette et le saxophone est vigoureusement accompagnée par les cors, trombones, violons, contrebasses et basse électrique. Le piano est utilisé comme un instrument à percussion.
La fin du morceau Bravura in the Face of Grief qui superposent des motifs rythmiques et harmoniques jouées au clavecin est particulièrement réussit. Elle illustre l'incendie qui détruit peu à peu toute l'oeuvre du dessinateur. Concernant l'instrumentation des morceaux on trouve une grande variété de bois dont le saxophone représenté par une variété de quatre familles différentes. L'alto, le baryton, le ténor et le soprano.
Le film eut un grand succès (particulièrement en France) chez la critique et un public avide de nouveauté mais aussi, comme l'atteste Peter Greenaway avec son humour pince sans rire chez les snobs !
par Julien Mazaudier
Interview B.O : Pierre Desprats (Les Reines du drame, de Alexis Langlois)
Interview B.O : Audrey Ismaël (Diamant brut, de Agathe Riedinger)