Né le 15 Mars 1947 à Los Angeles.
Compositeur régulier du cinéaste Walter Hill, le guitariste Ry Cooder est surtout réputé pour sa collaboration avec l'allemand Wim Wenders (mythique Paris Texas)... Il a participé à la fondation du groupe Buena Vista social club avec les maitres de la musique cubaine qui a donné lieu au film de Wenders.
Ses B.O notables : Paris, Texas ( Wim Wenders , 1984) •
En se plongeant dans la carrière de Ryland Peter Cooder avec une visée synoptique, on se rend très vite compte de l'ampleur de la tâche. Ce n'est pas que son œuvre ne soit pas cohérent – au contraire, bien au contraire – c'est qu'il se définit justement par sa pluralité et sa diversité. Ainsi, négliger un aspect de sa carrière, une collaboration, voire même une participation, c'est déjà prendre le risque de méprendre partiellement ce personnage, qui aura passé toute sa vie d' « ethnologue de la musique » à aller – pour résumer grossièrement – écouter ce qui se fait ailleurs (et ailleurs, c'est grand).
Né en 1947 en Californie, Ry Cooder débute comme musicien de studio, en travaillant notamment avec Randy Newman, les Rolling Stones, Taj Mahal ou en collaborant au premier album solo de Captain Beefheart, Safe as milk, sur lequel son jeu de guitare slide admirable est remarqué (pour l'anecdote, Ry Cooder a récemment été élu par la version américaine de Rolling Stone 8 ème plus grand guitariste rock de tous les temps juste devant – excusez du peu – Jimmy Page, Keith Richards ou Carlos Santana).
Ses première expérience avec le cinéma interviennent en 1970, avec Watermelon Man (en collaboration avec Melvin Van Peebles) et surtout avec Performance , film rock avec Mick Jagger de Nicholas Roeg, où il collabore avec Jack Nitzsche.
Les années 70 sont essentiellement consacrée à l'expansion de sa carrière solo (9 albums entre 1970 et 1980), ce qui incidemment lui permettra de se faire un nom, et dès lors de susciter les envies de collaborations, mais on y sent déjà cette volonté d'explorer de nouvelles terres musicales (on le surnomme parfois The musicologist ), en combinant allègrement folk, blues, tex-mex, gospel, jazz des années 20, dixieland, musique hawaïenne, rock cajun, rythm'n'blues et rock expérimental (ses capacités vocales et ses talents de parolier n'étant au passage pas toujours évidents). Toujours dans le registre de l'expérimentation, cette fois technique, il est par ailleurs à noter que l'album Bop till you drop , sorti en 1979 fut historiquement le premier album pop à être enregistré en Digital.
C'est à partir du début des années 80 que Ry Cooder se consacre réellement à la musique de film, d'abord pour The Long Riders , western de Walter Hill (avec un score très orienté country-bluegrass, mais qui offre – par exemple sur le morceau Archie's funeral – des parties à la guitare dont les ondulations annoncent Paris, Texas ), puis pour The Border (de Tony Richardson, avec Jack Nicholson, partition oubliable) et de nouveau avec Walter Hill pour Southern Comfort (peut-être son second score le plus connu, assez mélancolique).
La consécration intervient en 1984, avec Paris, Texas et son thème principal inoubliable (et bouleversant pour peu que l'on ait été marqué par le sublime mélodrame de Wim Wenders), accompagnant à la perfection les paysages désertiques texans. Même si l'on ne retient de lui que cette partition (certes envahissante sur une discographie), Cooder a continué à composer, dans un registre similaire, au rythme d'environ une bande originale tous les ans jusqu'à la fin des années 80, compositions desquelles on peut extraire Alamo Bay , film de Louis Malle, ou surtout Johnny Handsome , toujours de Walter Hill. En 1998, il composera quelques morceaux pour Primary Colors , aussi dispensables que le film.
Mais la vraie vocation de Ry Cooder, et nous l'avons déjà évoqué, c'est avant tout la rencontre, la découverte, la confrontation et la promotion d'artistes ou de styles trop méconnus du public occidental. Ainsi, durant les années 90, il mettra sa carrière solo entre parenthèses pour fureter, aller au quatre coins du monde, enfiler sa casquette de producteur (mais aussi et toujours musicien) et ainsi fournir des collaborations variées, surprenantes et nécessaires.
Parmi celles-ci, on doit citer A meeting by the river , avec le musicien hindoustani Vishwa Mohan Bhatt. Celui-ci, ancien élève de Ravi Shankar, avait inventé un instrument, appelé Mohan vina , obtenu en ajoutant des cordes sympathiques (évoquant ainsi le bourdonnement du son du sitar) à une guitare folk, et y jouant en faisant glisser sur les cordes un tube de métal ; soit précisément le principe de la guitare slide chère à Cooder : ces deux-là devaient se rencontrer ! Le résultat, fusion occidento-orientale (genre de blues hindou) très équilibrée, mérite le détour de l'oreille (et vaut largement, selon certains, le Passages de Ravi Shankar et Phillip Glass).
On peut également citer des collaborations avec des artistes maliens : d'abord la belle voix profonde d'Ali Farka Touré pour Talking Timbuktu en 1994, puis Baba Sissoko plus récemment ; avec le guitariste japonais Shoukichi Kina pour Introduction (1992) et pour Peppermint Tea House (en 1994) ; avec les irlandais des Chieftains en 1995 pour ce très bel album de duos qu'est The Long Black Veil (écouter le Love is teasin' de Marianne Faithfull, à pleurer) ; avec les Pahinui Brothers (hawaïens) sur leur album éponyme ; et ainsi de suite…
Auprès du grand public, le coup de World music (même si l'appellation prend aujourd'hui une connotation péjorative) le plus fameux reste cependant l'exhumation des papys cubains du Buena Vista Social Club , en 1997, immortalisés (Compay Segundo au premier rang) par le documentaire de Wim Wenders (pour lequel Cooder signa la même année la bande-originale de The End of Violence ). Le travail de Cooder à Cuba ne se limita pas à ce prestigieux club, mais ses collaborations postérieures aux albums d'Ibrahim Ferrer, de Ruben Gonzales, d'Eliades Ochoa ou même de Manuel Galban (Mambo Sinuendo) passèrent malheureusement plus inaperçues, bien que très intéressantes.
En 2003, Ry Cooder s'est lancé dans un autre projet, passionnant, consacré à la ville défunte de Chavez Ravine , sur les hauteurs de Los Angeles, victime du maccarthysme et du base-ball (plus d'explications sur le forum de Cinezik). Partant d'un témoignage du photographe Don Normark dans les années 50, s'entourant de musiciens locaux, Cooder travailla pendant deux ans à la réalisation d'un véritable documentaire audio, novateur, ambitieux, amer mais pas dénué d'humour, sur la vie d'une communauté latino durant les années 50, entre guerre froide et préoccupations quotidiennes, paranoïa extra-terrestre et virée entre chicanos, cohabitation inter-ethniques et montée du capitalisme… Le résultat (premier album signé Ry Cooder depuis 1987) est en tout point remarquable, parfois bouleversant, et rappelle que, à l'approche de ses 60 ans, Cooder garde toute sa vitalité et son énergie de musicologist . Puisse-t-il continuer à découvrir et à exhorter des talents pendant encore longtemps, tant cette entreprise est aujourd'hui précieuse et inestimable.
Interview B.O : Pierre Desprats (Les Reines du drame, de Alexis Langlois)
Interview B.O : Audrey Ismaël (Diamant brut, de Agathe Riedinger)