Tom Harari est né le 7 February 2012 ().
Le parcours atypique de Tom Harari, mélant la lumière et la musique, éclairant les films tout en y apposant ses notes de guitare, reflète l'énergie et l'urgence qui habite un certain cinéma français d'aujourd'hui, allant de courts et moyens métrages à des premiers longs (LA VIE AU RANCH, UN POISON VIOLENT). Ce cinéma-là a soif de tournage. Même si ces films sont très écrits, c'est sur le plateau que tout se joue, du jeu des comédiens à la lumière, en passant par la musique qui est rarement considérée à ce stade. Chef opérateur, Tom Harari puise son inspiration musicale sur le tournage. Sa guitare est comme un élément de l'image. UN MONDE SANS FEMMES reflète son double travail.
UN MONDE SANS FEMMES est un moyen métrage (58') de Guillaume Brac qui sort en salle le 8 février 2012, lauréat du Grand Prix au Festival de Brive 2011, Prix du court-métrage du Syndicat de la critique 2012, Prix du Public et d'interprétation féminine et masculine au Festival de Pantin 2011 et fait partie des nommés aux César 2012.
Cinezik : En tant que chef opérateur, comment vous est-il arrivé d'écrire de la musique pour un film ?
Tom Harari : Je viens de l'image et j'ai appris à faire de la guitare comme un loisir, sans sortir du cadre personnel. Puis pour des films sur lesquels je travaillais comme chef op (c'est le cas pour UN MONDE SANS FEMMES), des réalisateurs m'ont proposé de faire de la musique.
Pour UN MONDE SANS FEMME, à quel moment aviez-vous commencé à penser à la musique ?
T.H : Le montage était fait. Le réalisateur Guillaume Brac était au stade du montage son. En ayant travaillé sur le tournage pour la photo, je connaissais bien le film et avec Guillaume on s'entendait très bien. J'avais donc une vision intuitive du film. Le premier essai musical que j'ai envoyé fonctionnait bien dans l'esprit. Puis j'ai proposé des variations, lentes et rapides. Je n'ai jamais composé face aux images. Ce n'est pas vraiment de la musique de film écrite au montage avec un timing précis, c'est une simple ballade. Guillaume trouvait qu'en connaissant la lumière du film j'allais trouvé la bonne couleur musicale.
Quels étaient les désirs du réalisateur ?
T.H : Il me demandait au départ quelque chose d'assez enlevé et de rythmé en pensant à la séquence où les personnages courent à la plage. C'est un moment de gaité. Il y a donc ce côté sautillant. Mais il y a aussi un aspect mélancolique dans la mélodie auquel il avait moins pensé et il a aimé cette proposition. C'est comme s'il s'agissait de vacances au passé, avec un caractère nostalgique.
La musique est sobre et épurée. Ceci correspond à la nature de ce film, proche des films de Rozier ou de Rohmer avec cette simplicité humaine que l'on croit saisie à l'improviste, un peu comme l'apparition impromptue de votre guitare qui vient apporter ce zeste de grâce et de mélancolie...
T.H : Il y a en effet une économie de moyen. Cela correspond au film dans sa globalité et aussi à mon travail en tant que chef op. Le film est travaillé mais il y a une forme de transparence, au service des personnages et du récit. Il fallait une musique simple, qui peut se remarquer, mais qui soit aussi dépouillée, sur un ton sibyllin. Ce n'est pas un hasard que ce soit la même personne qui ait fait la lumière et la musique.
Cette simplicité était aussi celle du moment musical du film de Katell Quillévéré UN POISON VIOLENT lors de cette séquence où l'enfant joue de la guitare. On a l'impression d'un moment improvisée... (la réalisatrice nous en parlait ici)
T.H : Dans UN POISON VIOLENT, un enfant déclare son amour en chanson. Le jeune comédien savait jouer de la guitare, Katell voulait entendre Nirvana, mais il y a eu des problèmes de droit alors elle m'a demandé d'écrire une chanson qui serait une déclaration d'adolescent. C'était comme un jeu. L'idée était de se mettre dans la tête de cet adolescent.
Quelles musiques écoutez-vous ?
T.H : J'écoute de la folk et de la chanson française. J'aime beaucoup Georges Brassens. J'écoute aussi de la folk américaine des années 70, et un peu de rock. Dans UN MONDE SANS FEMMES, il y a un aspect folk, comme une ballade.
Que pensez-vous de l'utilisation musicale dans les films ?
T.H : Il y a la tendance d'utiliser des morceaux existants, de défricher le tube potentiel à plaquer dans un film. Je trouve que c'est un appauvrissement. Je trouve qu'il est intéressant d'avoir un travail de fond sur la musique. Après, je n'aime pas quand il y en a trop, quand la musique souligne ce qui se passe à l'image.
Enfin, quels sont projets personnels ?
T.H : Pour mes projets personnels, je prends mon temps. Je suis d'une nature plutôt lente. La priorité, c'est mon travail de chef op, mais j'aimerais réaliser des films. Je viens d'en terminer un, le DAHU, que des personnes trouvent assez étrange. J'aime beaucoup Fassbinder, mon film en est loin mais c'est quelqu'un qui m'inspire, dans le jeu d'acteur et la lumière, avec une certaine théâtralité.
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