Né en 1911 à Milan (Italie), mort à Rome en 1979..
Ses récompenses : Oscar (....) •
Ses B.O notables : La Strada ( Federico Fellini , 1954) • Satyricon ( Federico Fellini , 1969) • Roméo et Juliette ( Franco Zeffirelli , 1968) • Casanova ( Federico Fellini , 1976) • La Dolce Vita ( Federico Fellini , 1960) • Le Parrain ( Francis Ford Coppola , 1972) • Le Guépard ( Luchino Visconti , 1963) • Mort sur le Nil ( John Guillermin , 1978) • Vivre en paix ( Luigi Zampa , 1947) • Plein Soleil ( René Clément , 1960) • Huit et demi ( Federico Fellini , 1963) •
Descendant d’une famille de mélomanes avertis, Nino Rota naît le 3 décembre 1911 à Milan. Il étudie très jeune le piano avec sa mère et entre au Conservatoire de Milan comme auditeur dans la classe de Giacomo Orefice. De nombreux grands musiciens de l’époque fréquentèrent le domicile de ses parents, comme Toscanini et Puccini, c’est à cette époque que le jeune Nino Rota rencontre Luchino Visconti, puis deviendra plus tard l’ami d’Igor Stravinsky, Manuel de Falla et même Maurice Ravel.
En 1925, il reçoit des cours privés du compositeur Ildebrando Pizzetti et descend sur Rome pour continuer son apprentissage à la prestigieuse Académie de Santa Cecilia avec Alfredo Casella pour qui il composera son futur Cantico in Memoria di Alfredo Casella (1972). Enfant et adolescent prodige, il commence à composer et diriger extrêmement tôt (écrit à 11 ans, son oratorio L’infanzia di San Giovanni Battista est joué à Milan et Tourcoing dès 1923) et obtient son diplôme en composition dès l’âge de 19 ans. Après deux ans passés au Curtis Institute de Philadelphie (États-unis) où il perfectionne son écriture avec Rosario Scalero et la direction d’orchestre avec le célèbre Fritz Reiner, il rentre en Italie pour étudier la littérature et passer une thèse à l’université de Milan. En 1937, il devient enseignant en solfège à l’École de Musique de Taranto puis professeur d’harmonie et de composition au Conservatoire de Bari dont il devient même le directeur (1950-1975).
Il va écrire énormément tant pour le cinéma que pour la musique “sérieuse” : de nombreux opéras comme Il cappello di paglia di Firenze, La visita meravigliosa, Aladino e la lampada magica... des ballets comme La rappresentazione di Adamo ed Eva, La Strada (d’après la musique du film), Le Molière Imaginaire, ou Amor di poeta(écrit pour Maurice Bejart), sans compter une importante production orchestrale (plusieurs symphonies, des concertos pour piano, violoncelle, harpe, basson) et de musique de chambre (15 préludes pour piano, Ballade pour cor et piano, 5 pièces faciles pour flûte et piano, Élégie pour hautbois et piano, trios, quatuors, quintettes ainsi que de nombreuses sonates).
Il commence à travailler pour le cinéma dès les années 30, avec des films comme Treno popolare (1933) de Raffaello Matarazzo qui fut un échec, il persévère avec le même réalisateur dans Giorno di Nozze (1942), puis Il Birichino di papà (1943) et Zazà (1944) de Renato Castellani pour lequel il écrit des chansons (il en composera aussi énormément plus tard pour les films de Federico Fellini). Suivrons The Glass Mountain(La montagne de verre, 1949), Napoli milionaria (1950), L’ennemi public N°1 (1953) d’Henri Verneuil, Senso (1954) de Luchino Visconti sur lequel il signe des adaptations de musiques classiques, L’amante di Paride (1954) de Marc Allégret, La Bella di Roma(1955) de Luigi Comencini et bien d’autres...
En 1952, le grand réalisateur Federico Fellini lui demande de composer le score lyrique de son film Lo Sceicco bianco (Le Cheik blanc, 1952), ce sera le point de départ d’une collaboration aussi mythique que celle qui unissait Herrmann à Hitchcock et elle durera jusqu’à la mort du musicien.
Une musique comme La Strada (1954), écrite pour Fellini, résume bien le style symphonique de Nino Rota : une mélodie forte, spontanée et à forte résonance émotionnelle soutenue par des orchestrations toujours claires et sans complexités excessives. Comme un Astor Piazzolla, Nino Rota parait un peu moins à l’aise dans les grandes fresques où l’action nécessite d’être commentée au plus près des images comme War and Peace (Guerre et paix, 1956) de King Vidor ou Waterloo (1970) de Sergei Bondartchouk.
Mais Nino Rota prouve également qu’il maîtrise parfaitement l’improvisation et les instrumentations jazzy ou pop (avec moult pianos et orgues électriques dont les sonorités parfois datées sonnent aujourd’hui très “easy listening”), avec des scores comme Le Notti di Cabiria (Les nuits de Cabiria, 1957) ou La Dolce Vita (1960), deux autres films de Fellini. Plein soleil (1960) - superbe polar de René Clément avec Alain Delon, lui permet de composer d’excellents accompagnements orchestraux durant la scène du meurtre et les passages de suspense, lors d’un marché aux poissons et surtout pour le stupéfiant final plus connu dans une version avec orchestre et trompette solo.
Il signe deux autres grands films avec l’acteur Alain Delon : le tragique Rocco e i suoi fratelli (Rocco et ses frères, 1960) et Il Gattopardo (Le Guépard, 1963) à la célèbre valse, ces deux films étant signés par le légendaire Luchino Visconti. Citons aussi en 1968, la belle partition romantique qu’il écrit pour le drame Romeo et Juliette de Franco Zeffirelli d’après William Shakespeare dont un violoniste comme André Rieu fit récemment ses délices.
La Passerella qu’il écrit pour Otto e mezzo (Huit et demi, 1963) de Fellini est sans doute sa musique la plus célèbre pour ce cinéaste, mais ne doit pas faire oublier son élégant travail sur Giulietta degli spiriti (Juliette des esprits, 1965). À partir de la fin des années 60, ses musiques pour les films de Fellini se font un peu plus abstraites et plus complexes comme l’étonnante partition totalement atypique de Fellini Satyricon(1969), évoquant l’antiquité romaine par des percussions, des voix et des rythmes issus de différentes musiques traditionnelles (Afrique, Asie), extrêmement éloignée des colossales et anachroniques musiques symphoniques habituellement réservées aux gros péplums hollywoodiens comme Ben-Hur ou Quo Vadis. Il poursuit ce chemin vers des mélodies plus épurées dans Fellini Roma (1972), qui fait partie de ses plus grands chefs d’oeuvre, la superbe musique de l’Aria di Roma et surtout celle qui illustre le délirant défilé de mode ecclésiastique, sont de toute beauté. En 1972, le metteur en scène américain Francis Ford Coppola fait appel à lui pour son film The Godfather (Le Parrain, 1972) pour lequel il compose un thème principal nominé aux Oscars et qui fera le tour du monde.
C’est une mélodie simple et populaire qu’il choisit également pour le mélancoliqueAmarcord (1973) de Fellini, film nostalgique et romancé d’après la propre enfance du réalisateur, alors au sommet de son talent. Pour la suite du Parrain (The Godfather: Part II, 1974), il obtient un Oscar (une première pour un compositeur italien).
Dans le fantastique Casanova di Fellini (Casanova, 1976) - génial film retraçant la vie du célèbre séducteur, il rivalise d’invention et de créativité orchestrale (le compositeur français Alexandre Desplat qui admire particulièrement Nino Rota, à d’ailleurs eu l’occasion de détailler ce score dans le DVD du film). L’hypnotique thème principal de Casanova (avec piano Fender, célesta, harmonica de verre, guitares électriques et cordes) illustre merveilleusement bien l’atmosphère aquatique et nocturne que dépeint Fellini lors de la fête vénitienne du début du film. Rota se moque du personnage de Casanova en surlignant le côté mécanique de son érection (qui entraîne l’apparition d’un curieux oiseau métallique accompagnant tous les déplacements du héros) par une mélodie ironique à trois temps. Rota pastiche même le style sauvage de son ami Stravinsky (avec choeur, orchestre et grandes orgues) quand Casanova est invité chez le duc de Wuttenberg.
Le superbe et élégant score symphonique de Prova d’orchestra (Répétition d’orchestre, 1978) figure parmi les dernières partitions qu’il écrit pour le cinéma. Quand Nino Rota décède à Rome le 10 avril 1979 (suite à une thrombose coronaire), son influence est déjà colossale dans la musique de film, des musiciens comme Danny Elfman, Carlos d’Alessio, Alexandre Desplat et de nombreux autres lui sont énormément redevables.
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