Comment êtes-vous arrivé sur ce projet de Sandrine Kiberlain, sachant que l'actrice qui joue le rôle principal est votre fille, Rebecca Marder, est-ce que c'est lié ?
Marc Marder : Un tout petit peu, je peux l'admettre. C'est Rebecca pendant le tournage du film qui a fait écouter quelques-unes de mes musiques à Sandrine. Et puis elle m'a demandé de faire quelques essais.
Le film en était à quel stade, au montage ?
M.M : J'ai vu le film en montage. Ils étaient très proches de la finition.
Toutes les scènes de concert, les musiques jouées à l'image, étaient donc déjà faites avant votre arrivée ?
M.M : Ce ne sont pas mes musiques. C'est un autre compositeur, Patrick Desremaux, qui s'en est chargé, qui est flûtiste. Il a joué les parties de flûte jouées par le frère de Rebecca dans le film, ainsi que le petit ensemble orchestral à la fin du film.
Le sujet du film traite de la question juive à travers ce personnage principal en pleine seconde guerre mondiale. Vous avez donc choisi la clarinette pour convoquer cette culture ?
M.M : Il y a un morceau préexistant de moi dans le film où apparaît la clarinette et je voulais pour la musique originale la garder. Ce n'était pas que pour la culture juive, mais pour faire le lien avec ce morceau. Je l'ai fait écouter pendant le tournage et Sandrine l'a mis trois ou quatre fois dans le film, elle a choisi les endroits.
Le film est entre la comédie et le drame, il y a des instants de gravité mais beaucoup de légèreté, avec un personnage au bord du burlesque. À quel endroit se situe votre musique par rapport à ce personnage ?
M.M : Ma musique arrive plutôt dans les moments tragiques. Ce sont des moments où elle attend son copain qui ne vient pas, ou lorsque sa grand-mère cache des papiers d'identité.
Est-ce que la réalisatrice Sandrine Kiberlain avait une oreille attentive, quelle relation avait-elle avec la musique ?
M.M : Formidable, très pointilleuse, très musicienne. Elle est chanteuse par ailleurs. Elle savait exactement ce qu'elle voulait sur les endroits, jusqu'à un soupir. C'était très calé. Il n'y a pas tant de musique que cela dans le film, mais on a l'impression qu'il y en a davantage car c'est très bien mis en avant.
Quels étaient les mots qu'elle utilisait pour exprimer son intention musicale ?
M.M : J'ai surtout fait des essais jusqu'à ce qu'elle soit contente. Ses propos étaient par exemple sur le son de l'instrument, on s'est très bien compris. Elle était très claire dans ses intentions, même si ce n'était pas un langage musical c'était très compréhensible. J'ai beaucoup aimé travailler avec elle pour cette raison.
Elle paraît intuitive, axée sur les émotions, elle recevait votre musique émotionnellement ?
M.M : Tout à fait, elle n'a pas peur de l'émotion dans la musique.
Il y a des titres préexistants anachroniques dans le film, comme Tom Waits, il y a aussi une pièce vocale de Offenbach...
M.M : J'ai fait une musique qui arrive quand le personnage est au lit, quand elle commence à songer, qui fait écho à cet Offenbach. C'est la musique du rêve des jeunes filles.
Les goûts musicaux de Sandrine Kiberlain sont éclectiques, il y a même du Philip Glass...
M.M : Oui extrêmement. Pour Philip Glass elle voulait pour le générique de fin quelque chose de neutre. Elle a donc utilisé ce quatuor à cordes.
La place de votre musique au sein de ces titres existants était-elle évidente ?
M.M : Pas du tout, mais ça marche. Ma musique n'est pas de la même nature, elle est une véritable musique de film au sein de ces musiques d'un autre registre, mais ça se marie très bien.
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