junkyard-dog2022040213,malaussena,compositrices, - Interview B.O : Delphine Malaussena et Jean-Baptiste Durand (CHIEN DE LA CASSE) Interview B.O : Delphine Malaussena et Jean-Baptiste Durand (CHIEN DE LA CASSE)

[Nomination César 2024]

junkyard-dog2022040213,malaussena,compositrices, - Interview B.O : Delphine Malaussena et Jean-Baptiste Durand (CHIEN DE LA CASSE)

Propos recueillis par Benoit Basirico • Dans le cadre d'une rencontre au Festival Music & Cinéma de Marseille.

- Publié le 18-04-2023




Propos recueillis dans le cadre d'une rencontre au Festival Music & Cinéma de Marseille. Delphine Malaussena a composé la musique du premier film de Jean-Baptiste Durand, CHIEN DE LA CASSE, en salle le 19 avri 2023l, l'histoire de deux amis d'enfance (Anthony Bajon et Raphaël Quenard) dans un petit village du sud de la France. Leur amitié est mise à mal par une histoire d'amour qui, par jalousie, conduit à l'humiliation. Le réalisateur Jean-Baptiste Durand nous relate cette rencontre et cette collaboration, avec sa compositrice Delphine Malaussena qui nous détaille les choix musicaux, notamment celui du violoncelle.

Cinezik : Comment s'est faite la rencontre ?

Jean-Baptiste Durand : Delphine et moi nous sommes rencontrés lors d'une micro-résidence au Moulin d'Andé. J'y étais pour écrire mon film et il y avait des rencontres entre réalisateurs et compositeurs. Nous avons présenté nos projets et les compositeurs nous ont fait des propositions. Nous nous sommes ainsi présentés et avons eu un véritable coup de cœur artistique. Ce qui m'a séduit, c'était surtout son rapport au cinéma et au son en particulier. Delphine avait un parcours très éclectique, elle a été ingénieure du son auparavant, et il y avait une intelligence qui se dégageait d'elle. Nous avons beaucoup discuté et il y avait une sorte d'évidence mutuelle. Nous nous sommes revus plusieurs fois sans vraiment faire de promesses, mais l'évidence grandissait et nous avons fini par parler de musique. Puis nous avons participé à la résidence Emergence, où j'ai été lauréat en tant que réalisateur et elle chez les compositrices. Nous avons alors décidé de tester concrètement l'idée un peu saugrenue d'utiliser un violoncelle solo, un an ou deux avant de tourner le film. Nous avons trouvé que cela fonctionnait suffisamment bien pour poursuivre dans cette voie.

Delphine Malaussena, quel a été votre premier contact avec le film et quelle a été la première source d'inspiration ? Il y a une dureté entre ces deux jeunes et la musique, au contraire, semble chercher la tendresse. Est-ce que cela a été l'intention ?

Delphine Malaussena : Jean-Baptiste m'a fait lire le scénario assez tôt et c'est lui qui a eu l'idée que je compose pour violoncelle et chœurs. J'ai essayé de retranscrire les émotions des personnages, qui ne sont pas forcément dites, et je me suis vraiment basée là-dessus. Une autre source d'inspiration a été le lieu, le village. Nous voulions que la musique reflète ce lieu, cette arène. Nous voulions aussi que la musique représente le vent qui traverse les ruelles. Il y avait plusieurs sources d'inspiration.

Avant de composer de la musique de longs métrages comme également récemment "En plein feu" de Quentin Renaud avec Alex Lutz, vous étiez à la fois violoniste de formation, ayant suivi des cours d'orchestration et d'écriture, mais aussi ingénieure du son. En quoi le son du film a-t-il également été une inspiration ?

Delphine Malaussena : Le son du film a été une grande source d'inspiration pour moi. J'ai travaillé avec Hugo Rossi, l'ingénieur du son qui a également composé toutes les parties rap. Il y a un rappel entre les parties rap et la musique du score, avec une reprise du thème. Le lien avec le son et la bande-son en général était assez fort. J'aime bien penser le son d'une manière globale.

Le choix du rap était évident ?

Jean-Baptiste Durand : Tout à fait. Le rap était notre bande originale, c'était la musique que nous écoutions. J'ai été un grand auditeur de rap, je le suis toujours, mais je suis un peu resté bloqué dans les années 2000. Dans le rap, il y a beaucoup d'utilisation de samples funk et classique. Le classique fait vraiment partie du rap, notamment marseillais. Et dans ce film, il y a beaucoup de punchlines et de dialogues assez écrits, donc c'était presque du rap aussi dans sa conception. Avec la musique de Delphine, on n'est pas loin de ça. Nous avons travaillé avec des rappeurs avec lesquels nous avions déjà travaillé avec Hugo Rossi auparavant, des gens de Montpellier, nous avons vraiment choisi des personnes en particulier et même travaillé les textes en les orientant. Le rapport au mot est très important pour le personnage de Mirales (Raphaël Quenard) qui écoute du rap. C'est d'ailleurs par le rap que je suis arrivé à la lecture et ça m'a donné la passion des mots. J'écoutais beaucoup de rappeurs marseillais comme Akhenaton, donc le rapport aux mots était hyper important. J'aurais pu leur faire écouter d'autres musiques, mais ça me paraissait très important que ce soit des rappeurs un peu à l'ancienne, qui sont restés dans ce rap "bomba".

Et donc, Delphine, vous avez pris ce rap pour le travailler... Comment s'est passée cette collaboration avec Hugo Rossi qui est l'auteur des morceaux de rap ? Il y a une belle convergence entre ce rap et votre musique, avec ce thème au violoncelle qui se retrouve au générique de fin...

Delphine Malaussena : Nous avons beaucoup échangé ensemble, et c'est Hugo qui m'a demandé des samples. Je lui ai donné ce que j'avais fait, notamment les enregistrements avec Henri Demarquette, le violoncelliste. Et il les a intégrés dans le rap. C'était plutôt dans ce sens-là.

On parle des paroles de rap, et c'est un film très dialogué, ce qui rend le placement de la musique très délicat pour qu'elle intervienne avec ces dialogues... Ce placement a-t-il été le fruit d'une discussion ?

Jean-Baptiste Durand : Alors là, je ne peux qu'applaudir Delphine parce qu'elle a été d'une disponibilité absolument incroyable pendant le montage. Et en fait, on testait en permanence des choses. La monteuse (Perrine Bekaert), je l'appelais DJ Perrine parce qu'on prenait la musique, on la retravaillait, on la raccourcissait à la truelle, on envoyait à Delphine, et chaque semaine, il y avait au moins une, deux ou trois journées où on faisait des allers-retours pour voir si ça marche, pour tester. Je ne suis pas un intellectuel qui théorise, on est dans la pratique et c'était grâce à une disponibilité et un ego mis de côté. C'était très pratique parce qu'on pouvait se dire les choses, même si on tentait des trucs parfois un peu ridicules, c'était un travail de collaboration totale. Je lui avais envoyé des captures d'écran du tournage pour qu'elle puisse avancer un peu. Dès la première semaine de montage j'avais déjà des propositions de musique. Je crois qu'elle avait fait plus de 17 morceaux. C'est un gros travail. J'avais à peine commencé à monter le film, il y avait déjà des musiques très cohérentes parce qu'elle avait vu tous les rushs. Elle a été d'une générosité impressionnante.

La qualité de la musique repose aussi sur sa capacité à compléter le film. Elle vient dire autre chose que ce que l'on voit, notamment pour une scène de boîte de nuit où l'on n'entend pas la musique du lieu. Ils dansent sur quelque chose, mais on entend le violoncelle. La musique trace ainsi l'émotion intérieure des personnages.

Delphine Malaussena : Pendant cette séquence, on avait vraiment envie que le son passe de la musique de la boîte de nuit à ma partition qui emplit la scène. Et là, le violoncelle retranscrit l'histoire d'amour et le baiser. C'est hyper inspirant à faire.

 

Propos recueillis par Benoit Basirico • Dans le cadre d'une rencontre au Festival Music & Cinéma de Marseille.

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