par Benoit Basirico
- Publié le 27-05-2023Vers un avenir radieux (Nanni Moretti) - BO : Franco Piersanti (Compétition) ★★★★
Franco Piersanti retrouve Nanni Moretti pour la 7e fois depuis leur rencontre sur "Je suis un autarcique" (1976) et après "Habemus Papam" (2011) et "Tre piani" (2021). La musique avec la trompette, l'accordéon et les cordes convoque le cirque. Elle suit le personnage de Giovanni (Nanni Moretti), un cinéaste désespéré en pleine crise. On pense par instants à Nino Rota chez Fellini. Le film fait le bilan d’une vie consacrée au cinéma, convoque l’état du cinéma actuel à l’ère des plateformes. La partition prend alors les atours d’une célébration nostalgique tandis que des titres préexistants accompagnent des scènes de danse, de parade ou de liesse collective, que ce soit des chansons italiennes mélancoliques, de la soul entraînante, une chanson française romantique, ou une suite pour piano de Gabriel Fauré.
La Fille de son père (Erwan Le Duc) - BO : Julie Roué (Semaine de la Critique) ★★★★
Julie Roué retrouve Erwan Le Duc après "Perdrix" (2019) pour illustrer la relation d’un père (Nahuel Perez Biscayart) et de sa fille (Céleste Brunnquell) abandonnés par la mère. Des cordes soutiennent la dimension tragique et désespérée du récit tandis que des sonorités (flûtes, harpe, sifflement) insufflent de la fantaisie pour une humeur décalé chère au cinéaste. Pour l’anecdote, Julie Roué apparaît au piano face à des élèves dans une école au détour d’un plan. On y entend aussi “You’ll never walk Alone” de Rodgers & Hammerstein (1945). • Interview de la compositrice.
La Grâce (Ilya Povolotsky ) - BO : Zurkas Tepla (Quinzaine des Cinéastes) ★★★★
Zurkas Tepla signe la musique du premier film de Ilya Povolotsky, road movie à bord d'un van en compagnie d'un père et de sa fille sur les routes de Russie. Les insertions musicales par vagues créent une tension sous-jacente avec leurs dissonances. Les sonorités electroniques reflètent une angoisse que l'on peut deviner chez la jeune adolescente qui ne se satisfait pas de sa vie nomade.
Perfect Days (Wim Wenders ) (Compétition) ★★
Dans sa chronique tournée au Japon (sur le quotidien d’un agent d’entretien des toilettes publiques de Tokyo qui s'avère être poète et photographe à ses heures perdues), Wim Wenders ponctue le périple de son personnage par des titres de rock vintage (puisque le personnage écoute des K7 dans sa camionnette) avec des artistes tels que The Animals, Patti Smith, The Rolling Stones, Lou Reed, The Velvet Underground, Otis Redding, The Kinks, Van Morrison. Le final propose une version au piano de “Perfect days” de Lou Reed.
La Chimère (Alice Rohrwacher ) (Compétition) ★★
Alice Rohrwacher propose un récit éclaté et puzzle, mêlant un amour naissant et la quête d’un amour passé, un retour au pays, un rêve d’argent facile, des découvertes archéologiques, une matriarche, des brigands... le tout dans une petite ville du bord de la mer Tyrrhénienne. On y entend divers styles, de la musique baroque (Monteverdi), de la musique italienne, électronique (Kraftwerk), rock (Vasco Rossi), de l'opéra (G. Verdi), du classique (W.A. Mozart), de la musique latine (Tito Puente et Franco Battiato).
Rien à perdre (Delphine Deloget) - BO : Nicolas Giraud (Un Certain Regard) ★★★
Nicolas Giraud (trompettiste de Tony Allen) signe la musique du premier film de Delphine Deloget en prenant en charge les parties de trompette liées à l’enfant du film qui joue de cet instrument à l’image. La musique est donc un personnage et exclusivement intradiégétique. Par ailleurs, le groupe Franky Gogo, El Maout et Tatiana Mladenovitch jouent en live. Et Virginie Efira y chantonne « Les feuilles mortes ».
L'Été dernier (Catherine Breillat ) - BO : Kim Gordon (Body/Head) (Compétition) ★★★★
Kim Gordon (connue pour avoir été membre du groupe de rock Sonic Youth) signe quelques chansons originales pour le nouveau long métrage de Catherine Breillat avec le duo de guitares électriques expérimental Body/Head qu’elle forme en compagnie de Bill Nace. Elle ajoute deux titres de son répertoire (“Dirty Boots” avec Sonic Youth, et “Tripping” avec Body/Head). La cinéaste, qui avait fait appel à Didier Lockwood sur son dernier film, 10 ans plus tôt, "Abus de faiblesse" (2013), emploie la musique en véritable autonomie, sans qu'elle soit justifiée par le récit ni en soutien d’une émotion. Les chansons rock apparaissent momentanément (et à peu de reprises) en arrière-plan, sous les dialogues, comme pour faire exister par contraste la relation dissonante et malaisante qui se joue entre l’avocate (Léa Drucker) et l’ado, son beau-fils (Samuel Kircher).
The Old Oak (Ken Loach ) - BO : George Fenton (Compétition) ★★
George Fenton retrouve son fidèle cinéaste anglais Ken Loach avec un piano et des cordes pudiques en connexion avec le personnage de TJ Ballantyne (Dave Turner), le propriétaire du pub "Old Oak", qui évoque son passé, soutenant ainsi sa nostalgie. La musique est liée à cet homme désespéré, mais sur un ton apaisé, presque jazz, pour marquer l’âge de raison. A côté de ce point de vue, la musique se dispense de convoquer les réfugiés syriens au cœur du récit (et du village) provoquant des réactions de haine. L’aspect ethnique est convoquée dans une scène de concert lorsqu’un montage d’images de la jeune Syrienne, Yara, photographe, est accompagné par le musicien Saïd Chraïbi au Oud.
par Benoit Basirico
Interview B.O : Audrey Ismaël (Le Royaume, de Julien Colonna)
Interview B.O : Audrey Ismaël (Diamant brut, de Agathe Riedinger)