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Cinezik.org a déjeuné avec Marc Hillman, « musical supervisor » de Michel Munz sur AH SI J'ETAIS RICHE et LE CACTUS. Ses explications nous ont aidé à comprendre les enjeux d'un poste méconnu mais pourtant essentiel à la production de certains films.
Compositeur pour la télévision et pour le cinéma (BAXTER de Jérôme Boivin, LA MADONNE ET LE DRAGON de Samuel Fuller, la série TOUS SUR ORBITE qui lui a
valu une nomination aux 7 d'or en 98 et 99 meilleure musique originale , " Deux locataires pour l'Elysée ", " Les Cordier Juge et Flic ", et tout récemment un feuilleton fleuve franco-allemand de 30 heures : " Tout feu tout femme " diffusé sur France 3. ), heureux créateur du jingle de la marque Speedy et de la chanson TU M'OUBLIERAS de Larusso, Disque de Diamant en 1999, Marc Hillman peut s'enorgueillir d'avoir une grande expérience dans le milieu de la musique. Pourtant, l'âge le rattrapant, le compositeur français s'est heurté aux mêmes difficultés que son illustre collègue Philippe Sarde (voir notre entretien): plus on vieillit, plus on est ignoré par les réalisateurs. En 2002, Marc Hillman, sans abandonner sa carrière de compositeur, décide donc d'endosser le costume de consultant musical pour son ami Michel Munz. L'expérience ayant été concluante, le compositeur collabore de nouveau pour le même réalisateur sur la comédie française LE CACTUS (14 décembre 2005).
Le métier de consultant musical (« musical supervisor ») est un débouché intéressant pour ceux qui s'intéressent à la fois à la musique, au droit et à la gestion. Leur apport est à la fois artistique et technique et influe très directement sur la qualité de l'accompagnement sonore du film. Plusieurs consultants musicaux ont ainsi acquis une grande renommée : Valérie Lindon, Amélie de Chassey , et surtout Edouard Dubois. Selon Marc Hillman, la formation juridique du consultant est un grand avantage pour le producteur, car elle épargne à ce dernier des frais d'avocats.
Marc Hillman se définit comme « un conseiller artistique, chargé de la coordination de la musique et production musicale exécutive ». Après la lecture du scénario, le consultant musical intervient dans plusieurs directions afin de concrétiser les désirs du réalisateur.
1) Assistance du compositeur
Le consultant musical établit pour la musique un budget prévisionnel, qu'il fait valider par la production. Il conseille le producteur ou le réalisateur sur le choix d'un compositeur, fait réaliser des maquettes, puis négocie le contrat d'engagement du compositeur conclu entre le producteur et l'agent de l'artiste.
Il est ensuite chargé d'assister le compositeur à tous les niveaux. Sur LE CACTUS, Marc Hillman a fait appel à Cyrille Aufort pour orchestrer la musique de Michel Munz et a sollicité Olivier Renoir « pour arranger le générique début dans un arrangement teinté de pop hindoue psychédélique qui cadre avec les images de synthèse spécialement créées par la même équipe qui a réalisé le générique de ARRETE MOI SI TU PEUX de Spielberg ». La programmation de maquettes destinées à tester la musique à l'image est également supervisée par le consultant musical, qui a également un rôle de coordination entre le producteur, le réalisateur et le compositeur.
Ensuite, le « musical supervisor » négocie la réservation des studios, la location des instruments. Il convoque les musiciens, avec l'aide d'un régisseur, et contrôle leur présence aux séances d'enregisterment : c'est lui qui transmet les feuilles de séance signée au producteur. Il gère égalemnt les droits SPEDIDAM.
Enfin, il peut participer au mixage de la musique, et récupèrer les éléments du master des enregistrements, qui sont transmis à l'équipe de montage.
2) Recherche de musiques additionnelles
Le consultant musical a le plus souvent pour rôle de rechercher des chansons et des instrumentaux préexistants pour illustrer le film. Il recherche donc des morceaux correspondant à ce que veut le réalisateur. Sur LE CACTUS, Michel Munz avait demandé à Marc Hillman de faire des recherches dans le courant de la musique pop indienne, plus communément appelée Bhangra. Marc a écouté plus d'une centaine de chansons avant de trouver BARI BAARSI de Baba Shegal, « une vedette bien connue en Inde », MAUSAM de Nitin Sawhney, MITRO et BALLE BALLE.
Il négocie ensuite les droits éditoriaux et les droits phonographiques pour que soit autorisée l'exploitation de ces morceaux dans le film. Les droits phonographiques sont les droits détenus par le producteur de l'enregistrement utilisé. Les droits éditoriaux sont ceux détenus par l'éditeur (éditeur de la partition graphique ou exploitant de l'ouvre en nombre) : le simple sifflement de la musique de LOVE STORY par un acteur du film ne nécessite la négociation que des droits éditoriaux. En revanche, si ce sifflement a été repris tel quel, à partir d'un enregistrement préexistant, il faudra négocier les droits phonographiques en plus des droits éditoriaux. Cette négociation peut être très longue : de longs mois ont été nécessaires à Marc Hillman pour obtenir les droits de BARI BARSI auprès de son éditeur à Bombay.
3) Assurer l'exploitation dérivée de la musique de film et veiller à la protection des auteurs
Après le mixage définitif, le consultant musical veille aux formalités de dépôt SACEM de l'oeuvre (contrats d'édition, de co-édition, feuille de timbres, relevés des minutages (cue-sheet), dépôts des éléments auprès de la Commission de l'Audiovisuel de la SACEM) et à la mention au générique du film des intervenants (musiciens, interprètes, studios, éditions musicales, distributeurs phonographiques, chansons préexistantes)
C'est également le rôle du consultant musical de contacter les maisons de disque pour que la musique du film soit exploitée sous forme de phonogramme. En concertation avec le producteur, il établit le contrat de licence, et participe à la finalisation du master et à la conception du visuel de l'album.
Interview B.O : Pierre Desprats (Les Reines du drame, de Alexis Langlois)
Interview B.O : Audrey Ismaël (Diamant brut, de Agathe Riedinger)